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DUNES et PALMERAIES de DRAA
23 janvier au 2 février 2010

A la nuit tombante, l’éphémère rougeur des nuages s’immobilise sur notre campement
Au soleil couchant, des silhouettes de palmiers se détachent sur l’horizon flamboyant.
Voici notre décor à l’orée du désert, à la porte imaginaire qui s’ouvrira demain sur l’inconnu.
Sous les constellations étoilées, Orion déjà s’est installé pour veiller sur nos rêves ingénus.

La Lorraine glaciale et la vibrante Marrakech défileront en songes dans cette douce nuit d’hiver;
Places arpentées, ruelles déambulées, partout nos dirhams furent convoités à bras ouverts.
Déjà la ville avec ses charmes d’aujourd’hui et sa gloire d’antan se dissipe dans nos mémoires;
Tichka tout de blanc saupoudré puis le Draa tout en verdure ont jalonné la route de nos espoirs.

Au premier réveil, c’est le même émerveillement aiguisé par un nouvel appétit d’aventures.
Cinq dromadaires grognent d’impatience pendant que les chameliers harnachent leur monture.
L’approche du désert sera progressive; quelques hameaux isolés, dernières traces de civilisation
Puis de vastes étendues de cailloux et de terre craquelée où la vie semble en voie de disparition.

Privé d’eau et de végétation, le désert aride a repoussé les nomades et leur précieux bétail.
Ksour abandonnés, canaux desséchés, quelques débris de poterie et nulle trace de semailles.
Dans ce climat austère, les derniers palmiers couleur poussière ont cédé leur altière majesté
Aux tamaris esseulés dont le bois sec se consume sans crépiter mais avec efficacité.

Enfin voici les dunes, grains de sable qui désertent sans cesse, sable qui se dérobe sous nos pieds;
Une succession d’interminables monticules à franchir; les compter, un véritable casse-pieds!
Un sable omniprésent tamisé au fin fond de nos chaussettes. En tempête, le voilà speedy
A ensorceler une blonde tignasse, magnétisant sa mèche coquette en épi punky !
À se courroucer en tourmente, à virevolter en tourbillons, à convoiter un précieux bandana;
Mais généreux, il restituera le tissu tant convoité à la gitane en louanges de milles hosannas!

Le téléphone portable, en perdant ses satellites, nous isole définitivement de toute civilisation.
Pourtant dans la quiétude d’une nature ankylosée, le moindre signe de vie retient notre attention.
Le sirli rieur, le traquet à tête blanche et autres menus volatiles épient nos miettes rebelles.
Des scarabées noirs dessinent dans le sable frais du matin un tracé pointillé en fine dentelle.

Une cavité par-ci, un terrier par-là, présences et passages d’une faune rare et discrète;
Le fennec, vagabond nocturne, n’a point daigné nous montrer son fin museau ni sa foulée alerte.
Au loin, dans un restant d’oued, des aigrettes cherchent nourriture dans quelque mare
Tandis qu’au petit matin, une cigogne noire imaginaire ne suscite point de réveil en fanfare!

Il est vrai que la fraîcheur nocturne a suscité quelques marchandages pour fixer l’heure du réveil.
Tard, la veille, notre élogieuse chansonnette de geste vantait les mérites du tourisme marocain :
Tajines, couscous, thé, chameaux et dunes, cuisinier, guide et chameliers tous furent vantés pareil
Dans une composition improvisée et des refrains repris avec entrain au rythme du tambourin.

Le matin, après la pause cacahuète, l’heure de ripaille est proche ; les repas nous comblent d’aise;
Et jusqu’au fond de nos entrailles nous dégustons le pain fraîchement cuit à la braise.
Des guirlandes d’olives, un saupoudrage de cannelle garnissent une semoule à volonté
Sans compter les excès de soupe quand la louche du maître déborde de généreuse bonté.

Quand, après l’averse, un double arc-en-ciel scelle l’alliance entre le temporel et l’éternité,
Quand, après la révérence de l’astre ardent succède le halo naissant d’une lune tout en obésité,
Quand la cistanche refermera ses corolles jaunes afin de préserver sa jeune virginité,
Quand cet océan de vagues figées s’estompera dans la nuit étoilée… alors nos rêves de sable
Pourront lentement s’égrener en d’inlassables souvenirs de cette immensité inoubliable…
Alors, toi, Hassan, petit prince du désert, tu nous guideras en silence dans cet univers de fable!

Raymond